L'ouvrage de Dork Zabunyan, qui rassemble plusieurs articles et entretiens qu'il a pu proposer pour les Cahiers du cinéma ou Trafic, interroge la place et le mode opératoire de ces images amateurs réalisées dans le contexte de conflits sociaux, souvent afin d'infléchir leur déroulement et de le transformer en s'inscrivant dans un mouvement réticulaire qui les dépasse et les porte bien au-delà du lieu où elles se trouvent.
Entre 1981 et 1997 Anne Charlotte Robertson réalise son Five Year Diary, composé de trente-huit bobines de super 8 qui dans leur intégralité composent une fresque du quotidien de plus d'une trentaine d'heures, couvrant non pas cinq mais quinze années de sa vie. La grande originalité de ce travail nous semble être le traitement du son, en l'occurrence de la voix. Le film présente deux sources sonores : une parole enregistrée sur le film pendant le tournage ou extraite d'enregistrements sonores réalisés parallèlement au tournage, et un commentaire ajouté a posteriori, parfois une dizaine d'années après. Cette voix dédoublée peut évoquer les troubles mentaux de la cinéaste qui fit plusieurs séjours en hôpital psychiatrique et qui souffre selon les experts de trouble bipolaire. Lors des projections du journal auxquelles elle assistait elle rajoutait parfois une troisième couche sonore en commentant le film en direct.
Cet ouvrage interroge la spécificité filmique de l'autoportrait, en abordant notamment des films de cinéastes renommés, mais aussi des œuvres moins illustres appartenant au champ du cinéma expérimental : « contrairement à l'autobiographe ou au diariste, l'autoportraitiste ne met pas (seulement) en avant son identité sociale et l'histoire de sa vie passée ou présente, mais plutôt sa position de cinéaste. Il tente en effet de se représenter à un instant donné de son travail quand se pose la question : qu'en est-il de moi maintenant dans le cinéma ? ».
En découvrant les premiers courts-métrages de Damien Manivel, dont le second long sorti récemment en salle Le Parc prolonge les beautés tout en ouvrant de nouvelles pistes, l'on pouvait craindre et à raison que le geste de cinéma du jeune auteur déjà bien identifié et plébiscité par la critique n'emprunte de mauvaises voies. Le premier opus court La dame au chien tendait déjà le long de ses seize minutes le fil sur lequel le cinéaste allait faire tenir en équilibre des intentions aussi excitantes que risquées, pour le dire un peu sommairement : installer et faire tenir le malaise d'une situation dans laquelle des corps étrangers mis face-à-face vont se rencontrer pour mieux faire apparaître une dimension fantastique du quotidien dans ce qu'il peut avoir de plus élémentaire, de plus anodin, de plus primaire.
Le titre de l'exposition et les citations qui en tracent le parcours sont empruntées au roman autobiographique de Theresa Hak Kyung Cha, Dictée, qui évoque son expérience de l'exil à travers un dense réseau intertextuel et une expérimentation sur les rapports du texte à l'image. Les différentes œuvres présentées s'articulent autour de ces questions reprises dans le travail d'une autre artiste Coréenne, Sojung Jun, en résidence à la Villa Vassilieff. A travers des œuvres très diverses mais partageant l'interrogation sur l'identité culturelle et le dépassement des frontières autant culturelles que perceptives, l'exposition déploie une image et un discours de la multiplicité.
Le dvd « Experimental films from the Low Lands » édité par Re:Voir est consacré à quelques uns des films réalisés entre 1993 et 1999 dans la Studio één, laboratoire de cinéma indépendant notamment spécialisé dans le super 8 fondé par Karel Doing à Arnhem en 1989 aux côtés de Saskia Fransen et Djana Mileta. Cette compilation comporte des films très divers, complétés par un portrait de Karel Doing par Gaëlle Rouard et un entretien filmé avec Louis Benassi, ainsi que par un livret d'une trentaine de pages comprenant des textes écrits par chacun des cinéastes présentés.
Les films proposés pour cette séance sont, pour l'essentiel, pensés et conçus pour une diffusion Internet. Particulièrement courts, ils engagent une narration simple et autonome, qui permet de les recevoir pleinement, sans références à l'ensemble dans lequel ils s'insèrent possiblement. Le fait de voir ces films assemblés et projetés dans un certain ordre sur un écran change le rapport qu'ils instaurent habituellement. Leur plasticité devient peut-être plus évidente, et de nombreux liens semblent les unir secrètement.
Myriam Gourfink fait l'événement en ouverture du festival Faits d'hiver avec sa nouvelle création, Amas, qui circonscrit pour la danse "un espace qui ne se vide jamais". Le plateau du T2G retrouve une configuration orchestrale, habitée, avant même l'entrée des interprètes, d'un peuple d'enceintes, autant de musiciens invisibles, amplifiant dans un léger grondement, les signaux électroniques de Kasper T. Toeplitz. La lenteur, toujours de mise dans les pièces de Myriam Gourfink, rend sensible la respiration secrète de la forme, ses tensions basses, nourries en flux continu.
La dramaturgie d'ensemble est finement amenée, implacable, subreptice progression de l'informe pluricellulaire à la Pythie impassible dont la voix s'articule dans les cavités intérieures, filtre dans les muscles et sourd à travers les pores, à même la peau nue, alors que le visage et les lèvres restent souverainement immobiles.
Ce livre publié en anglais rassemble trois articles et un entretien consacrés au cinéaste canadien Mark Lewis. Il donne en outre accès, à travers un code vimeo, à 16 films de l'artiste réalisés entre 1995 et 2012. Le titre de l'ouvrage est un clin d'oeil à l'une des premières œuvres de Mark Lewis, Two Impossible Films (1995). François Bovier et Hamid Taiev développent cette division conceptuelle entre deux étapes de son travail dans l'entretien qu'ils mènent avec Lewis.