Johanna Vaude réalise, depuis 2011, des films de recut pour le magazine Blow Up d'Arte. Une vingtaine de films courts, compositions hybrides à partir de films de sources diverses, dessinent une cartographie singulière du cinéma populaire. Rencontre avec Johanna Vaude, qui replace ces films de commande dans son itinéraire.
Le plateau se déploie sous le regard, vaste territoire désert où des parois, des cloisons, des rideaux amples et épais dessinent des couloirs et des volumes, des zones dont les qualités sensibles se laissent deviner, distinctes. Un écran devient source de diffusion, membrane perméable, il laisse filtrer une étrange lumière mate, avant que des jeux de transparences ne s’engagent au-delà de l’opacité. Une présence s’affirme, abstraite, sensible, inquiétante, qui semble chercher son régime d’apparition, proche de la persistance rétinienne.
A l'origine de ces 9 ciné-tracts, réunis sous le titre Les films du monde, il y a un fait divers, celui d'un jeune noir qui se fait abattre de 9 balles par un policier en Alabama. La scène a été captée au téléphone portable par un anonyme et la vidéo, qui circulait beaucoup, a suscité chez Frank Smith, qui est poète avant d'être réalisateur, l'écriture d'un texte. Fank Smith s'est par la suite procuré ladite vidéo pour organiser la rencontre de son texte et des images, la répartition du texte, entre incrustation et voix off, s'opérant en fonction de ce que le matériau donnait à voir.
Le tourbillon Marlene Monteiro Freitas frappe à nouveau. Accompagnée par Andreas Merk, elle signe une pièce fragile et troublante dans sa volonté terrible de louvoyer, féline, dans la forêt des signes et symboles d’une période charnière de la fin XIXème et du début du XXème siècle, où les genres et les pratiques artistiques se mélangent et s’hybrident, se jouent des frontières de différents domaines de la création. La proie est de taille, la scène de chasse, hantée, l’amplitude imaginaire, démesurée, nous perd dans ses vertiges, là où l’énergie des interprètes n’en démord pas, ne relâche à aucun moment son emprise.
Inch'allah (1987), coréalisé avec Jean-Pierre Lenoir, a été tourné à Roubaix, où Chantal Briet a passé son enfance. L'idée qui a impulsé le film était de travailler avec des adolescents, en créant autour d'eux une trame narrative minimale, en proposant un dispositif où ils improviseraient en puisant dans leur propre expérience vécue. Par ce parti pris de réalisation, le film fait déjà signe vers une pratique documentaire que Chantal Briet développera par la suite. Plusieurs séquences sont également nées de situations vécues par les réalisateurs pendant la préparation et le tournage.
La première chose que le film nous adresse, et qui va guider notre regard sur les sentiers qui mènent au Pic du Canigou, place notre attention sous le signe d'une apparente contradiction. Comment une lumière peut-elle être fossile sans perdre sa qualité propre, qui est de se diffuser, d'irradier autour de soi ? Peut-elle être retenue dans la terre, parmi les pierres, sans disparaitre purement et simplement ?
Déambulations performatives, installations, projections vidéo, performances, une pièce de théâtre, un one-man-show-opera-rock, des discussions qui finissent en chanson, le dernier jour de l’exposition Alfred Jarry Archipellago vire au Performance Day, pose les prémisses d’un nouveau festival à La Ferme du Buisson, placé sous le signe du débordement : les temporalités se chevauchent et se font écho, les circulations se multiplient, les différents formats et médiums se contaminent, dialoguent et s’enrichissent mutuellement.
Le livre des tractations / Le livre des disparitions, publié en 1990 par l’éditeur Dis Voir, a été conçu en lien avec une installation multimédia nommée « L’Expulsion des Maures», que Raoul Ruiz présenta entre 1990 et 1991 en divers lieux : l’Institute of Contemporary Art de Boston, le Santa Barbara Contemporary Art Forum, l’IVAM de Valence, le Jeu de Paume à Paris et enfin le centre Witte de With à Rotterdam. Après avoir assisté à la mise en scène théâtrale que fit Ruiz de La vie est un songe, Jean-Paul Farge aurait déclaré que ce n’était pas du théâtre, mais une installation, ce qui donna à Ruiz l’idée d’explorer ce médium. Ruiz place ainsi cette œuvre dans une zone intermédiaire entre le théâtre et le cinéma. La pratique de l’installation devient le lieu d’une expérience intermédiale, où les propriétés des différents arts en viennent à s’échanger : « Faire parler l’espace pose un problème théâtral et cinématographique à la fois. En travaillant sur ces installations on arrive à comprendre le cinéma théâtralement et le théâtre cinématographiquement ». De cette expérience de l’espace naîtra un livre lui aussi spatialisé.
Du 14 décembre 2015 au 30 janvier 2016 s'est tenue dans l’espace d’art contemporain cachanais l’Orangerie une exposition consacrée aux artistes Loredana Rancatore et Laure Monbellet. Elle réunit un travail sculptural et une installation vidéo, qui se rejoignent par leur épure formelle, mais aussi par un penchant pour le mouvement et la recherche d'une temporalité qui dépasse le cadre purement géométrique.
Un feu de camp factice crépite dans un foyer de faux rochers. Philippe Quesne annonce la couleur d’entrée de jeu. Fidèle à ses manières de faire, il s’emploie à couper court à toute illusion théâtrale : nous sommes sur une scène, en plein monde de la reproduction, semble-t-il nous rappeler à chaque instant. Et pourtant la justesse de son geste artistique s’en trouve augmentée, qui invite à prendre le temps et nous laisse de l’espace, qui réunit les conditions pour que d’autres rapports à la nature, aux autres, au paysage deviennent possibles. Sur des territoires mouvants, sans cesses entrecroisés, où le théâtre, le cinéma et les arts plastiques se regardent en face et intensifient réciproquement leur potentiel imaginaire, les utopies sont désormais palpables.