Avant de donner son nom au projet éditorial dont cette revue est une déclinaison parmi d’autres, A bras le corps est le titre d’une pièce de danse mythique, un morceau de bravoure, porté par une virtuosité qui rivalise avec les Capricci de Nicollo Paganini, tout en s’en nourrissant. Puissamment vivante à travers l’épaisseur historique qui est devenue la sienne, cette création engrange des fulgurances permettant un aperçu de l’intensité des énergies mobilisées, maintenues à l’état de potentialités, préfigurant la décharge, terrible, sans cesse recommencée.
Fidèle à l’intérêt dont il témoigne pour la question de l’archive, de l’histoire et des partitions, Boris Charmatz propose un audacieux pari : la ligne est ténue entre le pastiche, le fake Cunningham, et la création. Plus que d’une pièce, il y va d’une recherche, d’un parcours à travers l’œuvre d’une vie et d’une mise à l’épreuve de quelques uns de ses principes fondamentaux : les procédés aléatoires pour chorégraphier, les relations à la musique et aux images.
Vêtus d'académiques aux couleurs bien acidulées, amateurs et danseurs professionnels partagent le plateau avec une énergie jubilatoire. Le format est ludique, le plaisir de danse communicatif. Roman photo, une expérience à vivre !
Accueillir au sein de la programmation des Spectacles Vivants du Centre Pompidou la pièce de Tino Sehgal, sans titre (2000), s’apparente à un acte réflexif. Au delà de la valeur certaine de ce travail, il y va d’une mise en perspective singulière des développements qui ont bouleversé les rapports entre les arts plastiques et les arts vivants dans la dernière décade.
Boris Charmatz met en branle, sur le plateau du Théâtre de la Ville, une grande forme chorégraphique, dans un acte qui travaille en profondeur nos certitudes et nos interrogations. Après presque deux heures ardues et électriques, énorme bouffée d’air frais : tout reste à repenser en danse !
Les ressorts intimes de la danse se sont rarement livrés avec autant de simplicité, de joie. Anne Teresa de Keersmaeker et Boris Charmatz arpentent avec espièglerie et gourmandise les architectures intérieures de la musique de Bach. Leur plaisir presque enfantin est largement communicatif, vivifiant.
Âpre, éprouvante, obstinée, la nouvelle création de Boris Charmatz met à mal les rouages et autres conventions spectaculaires. Il peut certes y avoir des délices, tout un art exquis de la table, mais le chorégraphe s’intéresse au côté machinal, répété jusqu’à l’épuisement : humecter, lécher, mordre, déchiqueter, mâcher, avaler, encore et encore, sans trêve. De Beethoven à Sexy Sushi, des Kills à Morton Feldman, en passant par Animal Collective ou György Ligeti, un souffle se lève, embrasse à la fois, dans sa terrible amplitude, chants liturgiques et liesse des émotions primaires, emporte magistralement la pièce.
Boris Charmatz renoue avec l’énergie terrible des années BOCAL* où la danse prenait corps au contact du froid et de la neige à 2000 mètres d’altitude, portée à ébullition par les poèmes de Tarkos. Aujourd’hui le contexte est tout autre. La danse prend le gout du béton auquel elle se heurte, assume ses aspérités et ses brisures, se coagule en blocs opaques.
L’essai proposé par la cinéaste Aude Fourel, depuis l’annonce des premières stations de son trajet, est sans arrêt, tout en rencontres, en sillons, dans l’aspérité des images, des amorces de la pellicule super 8 ou du crépitement de vinyles. Le film partage des témoignages, des langues parlées. Il redessine surtout une carte, en partant de l’Italie pour la Tunisie et l’Algérie, tout en mobilisant les souvenirs des militants, à Saint-Etienne, de La Révolution algérienne. Un voyage qui permet de faire écouter les mots et les chants du peuple algérien en guerre.
Des politiques qui s'engagent pour l'art et la création. Une équipe curatoriale qui allie exigence des propositions et conscience de sa mission citoyenne, à l'aune d'une « nouvelle écologie de l'art qui est en train de se mettre en place »*. Un tissu universitaire d'une grande effervescence et en forte demande de stimulation artistique et intellectuelle, dépassant largement le noyau tout naturellement concerné des étudiants de l'école des Beaux-Arts, du Master Exerce au sein d'ICI - CCN ou encore de l'École d'architecture. Le public montpelliérain au sens large, sa curiosité et son appétence à s'ouvrir de nouveaux horizons. Tous ces éléments sont autant ingrédients du MO.CO, un projet d'envergure dont Montpellier n'a pas à rougir devant les autres grandes métropoles européennes.