S’il s’apprête à abandonner la direction de la Volksbühne de Berlin, Frank Castorf demeure, à 65 ans, l’éternel enfant terrible du théâtre allemand. Un statut qu’il doit notamment à ses relectures radicales de l’œuvre de Fédor Dostoïevski. Après Les Démons, L’Idiot, Le Joueur, Humiliés et Offensés ou encore Crime et Châtiment, il s’attaque aujourd’hui à l’ultime roman de celui-ci, Les Frères Karamazov.
Avec Ça ira (1) Fin de Louis, présenté la saison dernière à Nanterre-Amandiers, l’auteur-metteur en scène Joël Pommerat donne à voir la politique et le théâtre en train de se faire. Un théâtre profondément démocratique, intelligible à tous, qui plonge le spectateur dans le bouillonnement idéologique révolutionnaire et réinterroge les nécessités de l’engagement politique.
Dans la foulée des Molière de Vitez, Gwenaël Morin et sa troupe de jeunes acteurs reviennent à Nanterre-Amandiers avec trois tragédies de Sophocle, Ajax, Œdipe et Électre dans trois nouvelles traductions de Irène Bonnaud et Malika Bastin-Hammou. Il poursuit son exploration de ces «espaces publics symboliques» que sont les classiques.
2666, le roman inachevé du Chilien Roberto Bolaño (1953-2003), est unanimement considéré comme l’un des premiers chefs-d’œuvre littéraires du XXIe siècle. Une somme qui devrait donner lieu à un spectacle monstre de près de douze heures, dont Julien Gosselin déclare qu’il devrait « être pour le spectateur ce que le roman est pour le lecteur, énorme, infini, jouissif, pénible parfois » ; une « expérience totale, une traversée commune pour les acteurs et le public, dans toute sa force et sa complexité ».
La mondialisation avance, la métropole s’étend, des géomètres actualisent les tracés, des migrants débarquent, des voisins xénophobes se verraient bien partir jusqu’en haut des montagnes. Chacun se fait son ¬ lm. Il va y avoir du sport et des coups de bâtons !
Joana Hadjithomas et Khalil Joreige construisent leur œuvre sur la production de savoirs, la réécriture de l’histoire, la construction d’imaginaires, mais aussi des modalités de la narration contemporaine en prenant appui sur l’expérience de leur propre pays tout en dépassant ses frontières. Le processus d’enquête auquel ils ont recours, leur questionnement sur le territoire, autant géographique qu’individuel, confèrent à leur œuvre une esthétique particulière. Ces questions imprègnent très fortement leur travail cinématographique.
À son tour, Tiago Rodrigues, auteur et metteur en scène des plus bouillonnants du théâtre d’aujourd’hui, livre sa propre vision du mythe. Si son texte est ponctué de quelques citations de Shakespeare, s’il est marqué dans ses plis de la lecture des Vies Parallèles de Plutarque, le metteur en scène a composé un poème à la fois épique et contemporain, qu’il donne, non pas à incarner, mais à parler-chanter-danser à Sofia Dias et Vítor Roriz, couple de danseurs et chorégraphes.
Avec Rêve et Folie, Claude Régy conclut toute une recherche qu’il a pu mener dans les contrées ultimes du langage. De Maeterlinck à Duras, en passant par Meschonnic, Sarraute, Kane et Vesaas, il a rencontré des auteurs qui lui permettaient d’exprimer l’insaisissable et l’indicible, et dont l’écriture faisait un aveu d’impuissance, se refusait à jouer le jeu de la rationalité et de l’intelligibilité.
Temporary Title, 2015 est une exposition conçue avec dix-huit interprètes se relayant pour former et déformer des groupes ou assemblées et composer un paysage en perpétuelle transformation. Nus, empilés, bras et jambes emmêlés, dispersés, regroupés ou solitaires, ils oscillent entre des présences aux apparences félines, sculpturales, minérales, végétales, mécaniques ou non identifiées. De temps à autres, ils s’extraient de ces compositions pour venir poser des questions à ceux qui les observent et continuent ainsi à brouiller les pistes sur nos rôles, entre sujet et objet. Dans cette situation, les visiteurs entrent et sortent à leur guise selon la durée qu’ils donnent à leur expérience.
Postérieurs est une épopée non-datée. Quatre danseuses chantent pour le retour, dansent pour l’accalmie, lisent l’avenir dans les entrailles d’une créature des mers. Elles y ont vu une éclipse solaire et une apocalypse terrestre. Comme dans les rituels primitifs, le poète (qui peut aussi être le danseur, le chanteur, le magicien) maîtrise un ensemble de techniques et de langages susceptibles de résoudre les propositions apparemment contradictoires.