Avidité philosophique. Audaces et fantaisies scéniques. Imparable humour pince-sansrire. D’un esprit inimitable, les pièces de Marco Berrettini tiennent toujours d’une forme d’aventure, exploration parfois tendue sur le fil, et aboutissement volontiers dans l’étrange, voire la stupéfaction. Et tout cela brasse obstinément la matière des destinées contemporaines, perçues au jour des philosophies les plus actuelles.
iFeel3 est autant un concert — chanté, magnifique — qu’une forte pièce de danse. Concert auquel se colle le chorégraphe lui-même, et qu’il donne étrangement par la voie des airs. C’est troublant, autant que puissant. Par contraste, c’est à ras de plateau, à hauteur de spectateurs, qu’évoluent les quatre danseurs. Inlassablement. Jusqu’à un renversement de situation finale, spectaculaire et splendide — mais impossible à révéler ici — la partition chorégraphique tient d’une boucle implacablement relancée.
Sous l’apparence de la répétition, tout est laissé, en fait, aux puissances de l’improvisation. Une incroyable multitude des variations d’états, d’actions, d’incidents, de micro-relations, déroule une parabole émouvante de la terrible banalité quotidienne. Et pourtant si dense. Alors, au fil de l’absurdité, un rien folâtre, vient à s’insinuer un suspense troublant, qui donne indubitablement un goût immodéré pour la vie (et pas que pour les jus de légumes pressés, qui font aujourd’hui autorité, comme chacun sait).