La galerie présente la deuxième exposition personnelle d’Ismaïl Bahri. Film à blanc qui s’articule autour d’œuvres réalisées dans le cadre d’une résidence de création à la Fabrique Phantom liée à l’Espace Khiasma, en 2013-2014. Cette résidence a donné lieu à l’exposition Sommeils à l’Espace Khiasma, avec en écho à celle-ci une deuxième scénographie Sondes conçue par l’artiste pour Les églises à Chelles, d’octobre à décembre 2014.
Projections : Film à blanc proposerait un revers lumineux de l’exposition sommeils qui a eu lieu à l’Espace Khiasma à l’automne 2014. Aussi y retrouvera-t-on des motifs similaires tels que les pulsations lumineuses, la question du film, ainsi que la mécanique d’apparition et de disparition, mais autrement abordés. Autre lieu, autre contexte : si la première exposition, immersive, donnait à pénétrer une chambre noire, la seconde en proposerait une formule négative, un pendant diurne, minimaliste et aérien sous la verrière de la galerie. A l’obscurité succèderait la lumière, au noir, des nuanciers se transformant par petites touches.
La nuance – c’est-à-dire l’écart infime – serait le principe mécanique de cet ensemble. L’exposition articulerait des cinétiques élémentaires et déploierait le fil d’un film dans l’espace. C’est en mêlant mécanique de l’image et mécanique des corps, que s’activeraient le travelling lacunaire d’une foule, la décomposition d’un souffle, ou la cinétique imperceptible de bobines en chute, le tout articulé par le mouvement du spectateur dans l’espace.
L’espace serait composé d’un fil d’images s’étirant comme une ligne d’horizon. Séquences coupées de blancs. En filigrane de cette cinétique, le motif de la Tunisie apparaîtrait par intermittence. Des paysages, des corps et des voix surgiraient par bribes. A l’image des vidéos qui laissent entrevoir une manifestation, il s’agit moins de capter « l’événement » que de le manquer. L’attention est déportée vers les marges, à l’endroit des épiphénomènes, et vers des transformations parfois si lentes et silencieuses qu’elles échappent à la perception.
Des voix viendraient à nous depuis des écrans placés comme autant de cartons ou de cartels oraux ponctuant cette mécanique générale. Ces voix révèleraient un peu de ce qui sous-tend l’ensemble, de ce qui se trame dans le blanc des images.
Film à blanc procèderait par affleurements. Sans jamais crever l’écran, l’exposition graviterait autour du pelliculaire de l’évènement. A l’image de la pellicule encore enfouie ou non impressionnée, la question du « film potentiel » traverserait l’ensemble de l’exposition. Et c’est depuis là que résonne le titre : le « film à blanc » n’est jamais totalement activé, il porte en lui des manques ; des dénouements latents. Chargés à blanc, ces films semblent actifs par leur inanité même et se donnent en surface à de potentielles projections.
Ismaïl Bahri